Reflets

17 avril 2006

On dit que les maisons sont le reflet de ceux qui les habitent. Alors j'observe la mienne et je m'interroge. J'essaie de trouver un sens. Un sens à ma vie.

Ni fait, ni à faire. Partie de rien, tout à refaire. Le bâti est là, l'essentiel est là. Mais certains murs sont encore blancs. Seules quelques petites pièces sont terminées. Il manque de la couleur, il manque de la vie.

Le désir de construire, de faire ma vie. Une maison à dépoussiérer, une maison à retaper, une maison à rémaménager, tout refaire dans les normes. Une vie à la traîne, une vie à redynamiser, la tête pleine de projets, faire comme tout le monde. Un rêve que j'avais écrit, le rêve d'une maison qui vit. Les choses se font petit à petit, pièce après pièce, au fur et à mesure de mes moyens, au fur et à mesure des rencontres. Mais parfois l'énormité de la tâche me fait baisser les bras, parfois je n'ai plus envie de me battre, trop d'efforts à fournir.

J'ai aimé cette maison quand j'en ai ouvert la porte la première fois. J'avais rêvé de tant de choses, d'une belle vie. C'est quoi une belle maison. Les sols sont magnifiques, des carrelages anciens. L'agencement me plaisait, j'en ai estimé le potentiel immédiatement, malgré la somme des travaux à faire, tant de possibilités. Pourtant les murs étaient à refaire, le toit était à refaire, tout ce qu'un minimum de confort exige était à refaire, c'était un coup de foudre inexplicable, incompréhensible pour d'autres, jamais je n'ai eu peur, j'étais seule, je savais où j'allais. J'ai des souvenirs, j'ai des désirs, il est trop tard pour les enfants, ceux des autres seront toujours bienvenus.

J'ai besoin de temps pour apprivoiser les lieux et avancer encore. J'aimerais qu'on me laisse le temps d'aimer. Ces murs me protégent, m'isolent. Je me suis éloignée, je me suis réfugiée. J'ai pris tout l'espace pour moi seule. Il y a trop de blanc ici, j'aimerais remplir ces vides.

Certains meubles nouveaux sont arrivés. De nouveaux amis remplissent une partie de ma vie. J'aimerais les voir plus souvent. Je voudrais pouvoir changer entièrement la décoration, mais je suis incapable de me séparer de certains objets, des cadeaux qu'on aimerait parfois cacher mais qu'on ne se résoud pas à jeter. J'ai fait un certain tri dans mes amis, la vie m'y a sûrement aidée aussi. Parfois je jette pourtant, mais je ne peux pas jeter tout ce qui ne me plait plus.

Les murs sont d'un blanc presque immaculé pour la plupart, juste une première couche de blanc pour cacher le gris du placo. On ne voit de moi que la façade, même si certain(e)s savent ce que cache la première couche, je ne peux pas toujours me cacher. Les murs extérieurs sont à refaire.

Je sais ce que j'aimerais accrocher sur mes murs, chaque pièce a sa définition, j'avais déjà quelques cadres, il n'y a pas d'idée préconçue. Je n'ai pas osé encore écorcher les murs pour les accrocher. Ils sont posés par terre. Mes souvenirs sont là, ils semblent inintéressants, comme posés par terre, je ne les montre pas davantage, je sais ce qu'ils signifient, je ne sais pas en parler.

Et puis il y a la cour, exactement celle dont je rêvais. Et puis il y a le jardin, ses fleurs, ses fruits, les voisins que je vois à travers le grillage, quelques brides de conversation quand eux aussi jardinent, le printemps qui est là maintenant. Je vais pouvoir ressortir le salon de jardin. J'ai plus de chaises qu'il n'en faut. Mes mains que j'aime mettre dans la terre, pour arracher les mauvaises herbes, faire pousser de nouvelles fleurs. J'ai mis des pensées dans mes balconnières.

Il y a tant d'envie encore, tant de choses encore à faire. Le bas n'est pas terminé, j'ai décapé l'escalier, j'aimerais faire ma chambre, j'aimerais en choisir la couleur, avec quelqu'un.

Posté par mirae à 20:02 - Commentaires […] - Permalien [#]