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mirae
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13 novembre 2005

Et puis...

Un jour l'édifice s'est fissuré, j'avais dix ans, je rentrais en 6ème....

J'ai le sentiment que c'est là que naît ma peur. Du jour au lendemain propulsée dans un monde nouveau, je suis confrontée à l'inconnu. Est-ce qu'on ne m'avait pas suffisamment expliqué les choses ? Je ne m'en souviens pas, je ne me souviens pas qu'on m'ait expliqué quoi que ce soit d'ailleurs. Je suis l'aînée, probablement que mes parents ne savaient pas non plus ce qu'ils devaient me dire.

Pendant un trimestre entier j'ai pleuré tous les jours. J'avais perdu tous mes repères, tout était différent. Ceux que j'avais connus jusque là me manquaient. Leurs parents les avaient inscrits dans d'autres écoles. J'étais perdue au milieu de ces autres qui eux aussi arrivaient d'ailleurs, parfois se connaissant.

Je suis restée dans cette école neuf ans ! Collège. Puis lycée. J'ai trainé cette peur de l'autre jusqu'au bout, même si plus tard elle s'est confondue avec un rejet d'une certaine société.

J'ai gardé quelques souvenirs de cette première année. J'étais submergée par mon émotion et ma peur. Je n'ai jamais vraiment réussi à me concentrer sur ma scolarité.

Je me souviens de la salle de cours et de ma place au premier rang, à l'extrémité de la rangée toutefois, et de cette petite blouse fleurie.

Je me souviens de ce petit garçon, Arnaud. Pour la première fois de ma vie j'entendais me dire que j'étais jolie, qu'il m'aimait bien. Je me souviens que cela m'a étonnée. Je n'ai sûrement rien répondu, mais c'était comme une éclaircie. Le soir même, naïvement, j'ai raconté l'histoire à maman. J'espérais qu'elle allait me donner la réponse à formuler. Je ne me souviens plus si elle a répondu, ou souri, ou acquiessé sans rien dire. J'ai juste la sensation de ne pas avoir eu la réponse que j'attendais, comme un nuage qui obscurcie l'éclaircie.

Je me souviens de ce premier poème que j'ai écri, que j'ai gardé dans sa version originale. (Avec le commentaire du Professeur de français : "Tout cela a-t-il été bien inventé par vous ?". Oui, Mademoiselle !). Ce poème je l'ai écrit d'un seul trait, à plat ventre sur la descente de lit, à côté de mon lit, là où je me cachais pour pleurer encore quand mes parents n'essayaient pas de comprendre mon chagrin.

"Paul, mon petit garçon !
Paul, récite ta leçon"
Mais Paul n'écoute pas,
Il cause avec un camarade
"Paul, que fais-tu ?"
Crie le Maître fâché.
Paul se retourne, apeuré.
Le Maître continue :
"Que faisais-tu ?
- Je parlais avec mon camarade
Il dit qu'il y a une parade.
- N'en parlons plus,
Récite ta leçon
- Je ne la sais pas"
Répond le garçon.
Mais le Maître l'a puni,
Il restera trois jours au lit.

J'ai flotté au-dessus, je n'ai jamais réussi l'immersion dans cette école privée.

On sait aujourd'hui qu'il faut dire les choses aux enfants. Vous, les parents d'aujourd'hui, prenez le temps de dire, de comprendre, de parler, d'expliquer. J'en ai terriblement manqué. J'ai juste su que je devais cesser de pleurer. Mes pleurs n'ont servi à rien.

Tout ça est gravé en moi à tout jamais. Je ne peux pas revenir sur le passé. C'est ma première blessure mal cicatrisée. Comme les autres elle s'ouvre encore certains jours.

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Commentaires
L
on, j'ai lu un auteur qui s'appelait Favre et qui parlait des insectes avec amour
O
Et de gros bisous en passant.
M
Lobita, tu as sûrement lu la saga des fourmis de Werber
L
J'ai aussi d'assez mauvais souvenirs des premiers jours d'école. Mais je t'avoue que les camarades de classe m'ont toujours paru moches et sauvages: ce qui m'a fascinée à l'école, c'est étudier les insectes (la société des fourmis! j'avais écrit et dessiné moi-même un BD là-dessus) et les étoiles... Ton article m'a donné envie d'écrire moi-même quelque chose sur mon enfance, je vais le publier aujourd'hui. Ciao!
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